Une bibliothèque en feu à Marseille, un magasin Darty pillé à Aubervilliers ou encore un véhicule blindé de la Brigade de recherche et d’intervention (BRI) en intervention dans les rues de Nanterre : les violences urbaines qui ont eu lieu dans la nuit du jeudi 29 au vendredi 30 juin dans plusieurs agglomérations françaises, trois jours après la mort de Nahel M., tué par un policier, ont été massivement documentées sur les réseaux sociaux.
Comme la veille, des vidéos d’incendies et de dégradations ont déferlé sur Twitter, Snapchat, TikTok et Telegram. Au point d’amener, vendredi, le président de la République, Emmanuel Macron, à appeler les grandes plates-formes à retirer « les contenus les plus sensibles », tout en leur demandant de collaborer pour identifier ceux « qui utilisent ces réseaux sociaux pour appeler au désordre ou pour exacerber la violence ».
Le circuit de diffusion des vidéos est assez souvent le même. Elles proviennent en grande majorité de Snapchat, réseau très populaire chez les plus jeunes – ainsi, 81% des 8-19 ans y possèdent un compte (Audirep/e-Enfance, 2021). L’application permet l’ajout de divers éléments aux images, notamment le nom de la ville, stylisé à la façon d’un tag. Les jeunes qui les postent oublient rarement cette coquetterie, affichant fièrement « Grigny », « La Grande Borne » ou « Nanterre ». Une manière de contextualiser un contenu mais aussi, sans doute, d’afficher son appartenance territoriale.
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Difficile, à ce stade, de parler de compétition ou de concurrence dans la manière dont chaque bande mène son émeute, mais la fierté de voir « sa » cité engagée est souvent mise en avant dans les vidéos.
Reste que la conception de Snapchat, faite essentiellement de comptes privés auxquels il faut s’abonner pour en voir le contenu, limite la viralité des séquences. Et si la « Snap Map » – une carte qui permet d’afficher des « stories » selon leur zone géographique – donne bien un aperçu de ce qui est diffusé dans certaines villes, cette fonctionnalité ne concerne que les vidéos publiques.
Le rôle-clé des comptes agrégateurs
Si ces contenus finissent par se répandre en ligne, c’est surtout grâce à certains comptes-clés, qui se chargent d’agréger les vidéos issues des comptes privés pour proposer une sorte de sélection du « meilleur » des images d’émeutes. Parce qu’ils collectent des centaines d’images et de vidéos diffusées tout au long de la nuit, et il n’est pas rare de voir les auteurs avouer leur fatigue au bout de longues heures passées à scruter les réseaux.
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