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Elle avait réalisé tout ce qu’elle avait sacrifié pour lui, afin qu’il puisse monter sur son trône de roi soleil

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Autrefois : Rachel, Mathieu, leur fille Alice et Mado, la mère de Rachel, sont arrivés sur l’île de Porquerolles. Malgré le bleu du ciel et de la mer, leurs vacances ont commencé dans une ambiance orageuse. La semaine dernière, Rachel a missionné Alex, le copain d’enfance, de sectionner le bout qui amarre le bateau adoré de Mado.

Retrouvez ici toutes les fictions de “Une histoire de…”.

Accroupie sur une langue de sable jaune étirée entre deux rochers noirs à l’ombre d’une branche de pin touffue, Rachel tangue. La position pourtant enfantine est impossible à tenir dans son état. Comme minéralisée, elle perd l’équilibre et tombe sur le côté gauche, recta. Elle éprouve une fatigue sans commune mesure, au sens où ça ne ressemble même plus à de la fatigue. Un mix d’ultravigilance aux yeux secs et de grand vertige mou comme une atrophie musculaire.

Le manque de sommeil prolongé produit le même effet que le LSD, il tord le réel et trace des contours mouvants qui échappent à la perception. Il soustrait, multiplie, déforme et fabrique des chimères. Une marche à descendre est un ravin à enjamber, un moteur de moto produit le son d’une tronçonneuse placée à l’intérieur de l’oreille, une éraflure devient une estafilade au rasoir.

Elle avait vrillé

Elle s’assied sur un rocher. La plage, classée plus belle plage du monde malgré les posidonies et la foule dévorante, apparaît beaucoup plus près que ce qu’elle pensait. Elle n’aura pas besoin de ses jumelles et peut donc se contenter d’être une vacancière comme les autres qui profite du soleil de 17 heures sur un rocher, et pas une tarée en planque qui observe sa propre famille en lui souhaitant le pire. Elle regarde sa fille jouer sur la plage et se souvient qu’un jour, il n’y a pas longtemps, elle était encore sa mère. Alice sent-elle que Rachel est en train de se perdre, ailleurs, à des années-lumière d’elle ?

Elle regarde son mari, assis sur le sable, son corps forme un « C » maigrelet. Il a fait entrer la peur chez eux et la colère en elle. Il y a deux mois, quand le harcèlement avait débuté à Paris, elle avait eu pitié de lui, le pauvre, encore des problèmes, il est vraiment chat noir. Bercée par la mythologie ronronnante du gars qui n’a pas de chance dans la vie et qui a besoin de s’entourer de femmes secouristes, parce que, quand même, il souffre plus que les autres, elle avait eu peur pour lui. Avant d’avoir peur pour elles.

Et puis, la fatigue aidant, la lucidité venant, elle s’était rendu compte de tout ce qu’elle avait sacrifié pour lui, pour qu’il puisse monter sur son trône de roi soleil, sauveur du nouveau monde. Travailler plus, prendre des dossiers de merde pour le soutenir, dormir moins puis plus jamais, parce que lui avait besoin de sommeil pour être bien, tout entier à l’éternelle et tyrannique gloire matinale des entrepreneurs. Et le jour où il était parvenu à lui faire croire que la meilleure idée était de les laisser à Paris, elle et Alice – « Je suis la cible, faut que je m’éloigne » –, et qu’elle s’était retrouvée seule, à étoffer tous les deux jours le dossier de plaintes au commissariat suite aux nouveaux crimes du harceleur, et à avoir peur qu’on lui vole Alice dans la rue, elle avait vrillé.

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