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À la poursuite de Sixto Rodriguez, le “Sugar Man” à la vie douce-amère

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Au moment d’emprunter l’escalier, sa fille Regan prévient qu’il fait chaud, là-haut. C’est sombre, aussi. Des rideaux ou de simples tissus occultent les fenêtres. Une odeur de marijuana plane. Sa silhouette se dessine dans l’obscurité d’une chambre, de profil, les genoux repliés sur son lit. Impossible de voir la teinte de la couverture, si quelque chose est accroché au mur. Son tee-shirt semble clair. Sa voix est un murmure. Sur la table basse, quelques bougies sont ajoutées pour notre rencontre.

Son visage apparaît, les yeux cachés derrière des lunettes de soleil aux couleurs de la bannière étoilée américaine. L’une de ses mains attrape la mienne pour créer le contact. Il a ces très longs doigts qui semblaient rétrécir la guitare, il lui confiait le rythme, la mélodie était dans sa voix. “Vous jouez encore ?” “Non, plus du tout.” “Même ici, avec des amis ?” “Ils sont les bienvenus. Mais je les écoute jouer.” “Pourquoi vous ne jouez pas avec eux ?” “Pour beaucoup de raisons. Et j’ai 80 ans.”

Il fuit la lumière

Sixto Rodriguez est né le 10 juillet 1942. Nous sommes le 8 juillet 2022. La maison se prépare à célébrer son anniversaire le lendemain, avec un jour d’avance. ­A l’arrière, l’affiche du film qui lui a été consacré, Oscar du meilleur documentaire en 2013, a été déroulée depuis le balcon supérieur. L’homme flotte tel qu’on l’a découvert, tel qu’il restera, silhouette aux cheveux longs, la guitare dans le dos. Sugar Man, ou l’histoire d’un songwriter américain sans succès, qui ignore à quel point il est vénéré en Afrique du Sud. Là-bas, ses deux uniques albums, sortis au tout début des années 1970, étaient devenus la bande-son d’une jeunesse blanche en lutte contre l’apartheid.

Ses fans le croyaient mort d’une façon tragique, mais deux d’entre eux le retrouvèrent dans la misère de Detroit au cours des années 1990. Cela a donné lieu, il y a dix ans, au documentaire du Suédois Malik Bendjelloul (qui s’est suicidé en 2014). Et Rodriguez a surgi, notamment en Europe. Ce fut comme une capsule temporelle, comme si le dégel ou les fonds marins révélaient un trésor enfoui, d’importantes chansons du siècle dernier, comme si tout n’avait pas été dit, comme si d’autres Dylan, à qui il fut immédiatement comparé, pouvaient éclore encore au temps des synthétiseurs, des utopies et des colères enterrées.

“Rodriguez ne vivait plus que dans une pièce, tout près d’un poêle. Quand il n’avait plus de bois, il allait en ramasser.” Danny Kroha, guitariste

C’était comme un conte. La maison n’apparaissait pas dans le film. Une autre façade avait été choisie pour ne pas donner son adresse. On ne voyait que l’intérieur, l’unique pièce où s’il s’était retranché et que les musiciens de Detroit connaissaient bien. Eux n’avaient pas attendu les Sud-Africains, ils savaient. Dès les années 1990, dans les bons record stores des Etats-Unis, on cherchait ces deux pépites que sont Cold Fact et Coming from Reality, qu’un certain Rodriguez avait sorties coup sur coup, en 1970 et 1971. Un label de Seattle – Light in the Attic – avait fini par les ressortir en 2008, soit quatre ans avant le film, et Sixto Rodriguez avait immédiatement repris le chemin des petites scènes américaines.

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