L’Indien Narendra Modi : un partenaire incontournable et controversé

Le paria d’autrefois est célébré à Washington, courtisé à Paris, et maintenant bien ancré dans son rôle de partenaire incontournable pour les chancelleries occidentales et celles du Sud global, capable de dialoguer aussi bien avec la Russie qu’avec le Japon ou l’Arabie saoudite. Invité d’honneur à la cérémonie du 14 juillet, lors de laquelle 250 soldats indiens défileront sur les Champs-Élysées, le premier ministre indien, Narendra Modi, est revenu pourtant de loin. Autrefois accusé de complicité dans les pogroms antimusulmans qui ont ensanglanté l’État du Gujarat en 2002 – entraînant la mort de plus d’un millier de personnes, dont une majorité de disciples du Prophète – dont il était alors le dirigeant, il s’est vu interdire de visa aux États-Unis pendant une décennie.

Mais cela fait désormais un moment que ce nationaliste hindou décomplexé à la posture autoritaire bénéficie d’un accueil chaleureux dans les grandes capitales. Il est au pouvoir depuis neuf ans, après la victoire de son parti politique, le Parti indien du peuple (BJP), aux élections législatives de 2014 et de 2019, et il est bien placé pour remporter de nouveau les élections de 2024.

À Washington, à la fin du mois de juin, Joe Biden a accueilli chaleureusement le dirigeant indien, et sa visite a été marquée par la signature de contrats importants dans les domaines militaires, économiques et technologiques, ce qui reflète l’évolution d’une relation bilatérale “plus solide, plus étroite et plus dynamique que jamais”, selon les mots du chef de l’exécutif américain.

À la traîne en matière de développement

L’Inde, autrefois un pays phare du mouvement des non-alignés, a développé sous la direction de M. Modi un concept singulier de diplomatie “multi-alignée” qui lui permet de réaffirmer son indépendance stratégique et d’élargir le périmètre de son influence tous azimuts. Au nom de cette doctrine résolument opportuniste, elle reste un partenaire de la Russie – dont elle dépend encore à 50% pour sa défense et à laquelle elle achète du pétrole brut et du gaz à bas prix depuis le début de la guerre en Ukraine – tout en se rapprochant de plus en plus des États-Unis ; ces derniers voient en ce grand rival de la Chine le contrepoids idéal à l’émergence agressive du régime de Pékin.

L’Inde de Modi peut également se vanter de résultats économiques qui justifient son rôle accru sur la scène internationale : une perspective de croissance de 5,9% en 2023, l’une des plus fortes au monde. La cinquième économie mondiale bénéficie notamment du fait que les investisseurs étrangers se détournent de la Chine et cherchent à diversifier leurs chaînes de production. Cependant, bien que son économie devrait surpasser celle du Japon et de l’Allemagne d’ici 2028, elle est encore en retard en matière de développement et abrite encore 229 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, selon les Nations Unies.

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