L’émoi est profond. S’ils sont habitués à voir leur travail critiqué, cette fois les magistrats ont l’impression qu’un cap a été franchi. Selon certains d’entre eux, les propos du directeur général de la police nationale, Frédéric Veaux, au sujet du placement en détention provisoire d’un policier marseillais, le 20 juillet, pourraient même raviver le vieux conflit entre la police et l’institution judiciaire.
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Dans un entretien au Parisien du lundi 24 juillet, M. Veaux a ainsi déclaré que “savoir le policier en prison [l’empêchait] de dormir”. En disant se garder “de toute appréciation” sur le fond du dossier, le patron de la police a ajouté comprendre “l’émotion, et même la colère” de ses troupes, estimant qu’“avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison”. Il a toutefois précisé que “la justice ne cède jamais à la pression médiatique ou de la rue, elle traite les dossiers. L’émotion et la colère passées, il faut se donner les moyens techniques et judiciaires pour que ce fonctionnaire de police retrouve la liberté”.
Mis en examen comme trois de ses collègues, le policier en question est accusé de violences en marge des affrontements et des pillages survenus à Marseille dans la nuit du 1er au 2 juillet. D’après les déclarations d’un jeune homme de 21 ans, Hedi, six policiers l’auraient battu après qu’il a reçu un tir de lanceur de balles de défense (LBD) en pleine tête. Après deux interventions chirurgicales, il s’est vu prescrire plus de soixante jours d’incapacité totale de travail.
“Position claire du ministre”
Après plusieurs heures de silence, le président de la République, Emmanuel Macron, a estimé lundi, de Nouméa, où il est en déplacement, que “nul n’est au-dessus des lois” même s’il a dit comprendre “l’émotion des policiers” après les récentes émeutes. Peu de temps après, le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, a lui aussi réagi. “Nul n’est au-dessus de la loi de la République. La justice doit poursuivre son travail dans la sérénité et en toute indépendance. C’est une condition indispensable au respect de l’Etat de droit, qui est le fondement de notre démocratie” a écrit dans un tweet le garde des sceaux. Sera-ce suffisant pour atténuer les craintes des magistrats ? “Nous sommes rassurés par la prise de position claire du ministre de la justice, que l’on aimerait toutefois entendre autrement que par un tweet pour avoir une portée politique plus forte”, a ainsi estimé Kim Reuflet, présidente du Syndicat de la magistrature (SM, gauche).
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