Cinq policiers de l’antenne de Marseille du RAID, une unité d’élite, ont été placés en garde à vue dans le cadre d’une enquête sur la mort d’un jeune homme de 27 ans, Mohamed Bendriss, en marge des émeutes début juillet à Marseille, a annoncé mardi 8 août le parquet.
« Ces gardes à vue interviennent sur commission rogatoire du juge d’instruction dans le cadre de l’information judiciaire ouverte le 4 juillet », a expliqué le parquet dans un communiqué. La procureure de la République de Marseille, Dominique Laurens, précise que « plusieurs autres policiers sont également convoqués ce jour afin d’être entendus en qualité de témoins ».
Lire aussi :
Article réservé à nos abonnés
Emeutes urbaines : l’IGPN saisie après une mort suspecte en marge des violences à Marseille
Dans la nuit du 1ᵉʳ au 2 juillet, alors que le centre de Marseille était en proie à des dégradations et pillages à la suite de la mort de Nahel M., Mohamed Bendriss avait perdu la vie après avoir fait un malaise alors qu’il circulait à scooter. C’est lors de son autopsie qu’avait été repérée sur sa poitrine la trace de ce qui pourrait être l’impact d’un tir de lanceur de balle de défense (LBD). Le 4 juillet, le parquet jugeait « probable » que son décès ait été provoqué « par un choc violent au niveau du thorax causé par le tir d’un projectile de type Flash-Ball », ce traumatisme ayant entraîné un arrêt cardiaque.
Une information judiciaire pour « coups mortels avec usage ou menace d’une arme » avait été ouverte le 4 juillet, confiée à la police judiciaire et à l’inspection générale de la police nationale. « Des événements de type émeutes et pillages se déroulaient cette nuit-là dans le secteur, sans qu’il soit possible de déterminer si la victime y avait participé ou même si elle avait pu circuler dans une telle zone », précisait alors le parquet.
Sa famille « recherche uniquement et seulement la vérité et la justice »
« La famille de Mohamed est dans l’espoir que les policiers soient identifiés et poursuivis », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) Arié Alimi, avocat de la femme de M. Bendriss. « Il est incontestable aujourd’hui que ni Abdelkarim [un jeune éborgné à Marseille] ni Mohamed n’ont commis de dégradations ou violences qui puissent justifier ces crimes de policiers sur eux », a-t-il ajouté.
Quelque 200 personnes s’étaient rassemblées pour une marche blanche le 6 juillet à la cité Air Bel, à Marseille, au pied de l’immeuble où vit la veuve de Mohamed Bendriss. « Sa mère dit que son fils n’était pas dans les émeutes », a fait savoir mardi 8 août à l’Agence France-Presse Kaouther Ben Mohamed, présidente de l’association « Marseille en colère ! », qui s’était mobilisée lors de la marche blanche début juillet. Les proches de Mohamed avaient également espéré qu’une enquête « loyale et objective » ait lieu.
Ils avaient souligné, le 7 juillet, à travers un communiqué des avocats Thierry Ospital et Frédéric Coffano, conseils respectivement de la compagne et de la mère de Mohamed Bendriss, que la famille « recherche uniquement et seulement la vérité et la justice » et qu’elle n’entendait « en aucun cas polémiquer et porter des accusations ou anathèmes à l’encontre de quiconque ».
Jusqu’ici, peu d’éléments avaient filtré, et son cas était passé dans l’ombre d’une autre affaire survenue la même nuit en marge des émeutes, celle d’Hedi R., dont une partie du crâne a dû être amputée. Après ce passage à tabac, il s’agit d’une nouvelle enquête à Marseille mettant en cause des agents des forces de l’ordre qui pourraient être soupçonnés de violences policières.
Déplacement discret de Darmanin à Marseille
Le 21 juillet, quatre policiers marseillais avaient été mis en examen pour les violences contre Hedi R. du chef de « violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) supérieure à huit jours » aggravées par trois circonstances en ce qu’elles ont été « commises en réunion, avec usage ou menace d’une arme et par personne dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions ». Sur ces quatre fonctionnaires, trois avaient été placés sous contrôle judiciaire et un placé en détention provisoire, où il se trouve encore après le rejet de son appel début août par la cour d’appel d’Aix-en-Provence.
Cours en ligne, cours du soir, ateliers : développez vos compétences
Découvrir
Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, s’est d’ailleurs discrètement rendu mardi dans un commissariat de Marseille pour échanger avec les fonctionnaires, a appris l’AFP de source policière. Il a félicité les fonctionnaires pour une saisie de cannabis puis, « de manière informelle », au interagit durant une heure avec une soixantaine de policiers, d’après cette source.
Une troisième affaire concernant une plainte à l’encontre de policiers est toujours en cours d’instruction à Marseille : Abdelkarim Y., 22 ans, se dit victime d’un tir de LBD de policiers du Raid dans la nuit du 30 juin au 1er juillet. Cousin de Mohamed Bendriss, il a perdu l’usage de son œil. Le parquet a ouvert une enquête préliminaire du chef de « violences volontaires en réunion ayant entraîné une mutilation ou infirmité permanente par personne dépositaire de l’autorité publique et avec arme ».
Lire aussi :
Article réservé à nos abonnés
Les enquêtes sur les agissements des forces de l’ordre pendant les émeutes se multiplient